C’est peut-être une des leçons d’avancer dans l’âge. Être peu à peu capable de quitter l’autre, les autres.

Nous nous retrouvons dans un hôtel avec Helen, nous partageons la même chambre et travaillons ensembles avec le groupe vocal de Lu.
Un peu comme on reprend une histoire interrompue il y a quelques années. Intacte l’histoire en fait.
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En face de l’hôtel, il y a un gigantesque mall (une sorte de centre commercial style grand littoral). Lu et Filipe nous ont dit, c’est bien ici vous avez un centre de shopping très beau. Nous y sommes allées, Helen et moi. J’ai trouvé cela très exotique, traverser l’océan et se retrouver à se promener dans le centre commercial !!! j’ai fini par trouver les havaianas pour mes enfants et je me suis enfuie.
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Hier soir nous avons travaillé avec le groupe vocal qui chante avec des percussions corporelles. Le groupe est fort ensemble, mais les personnes sont assez faibles vocalement individuellement. Nous avons parlé avec le chef de chœur.
Helen est plus radicale que moi, elle pense que le groupe ne pourra pas évoluer suffisamment, que la limite est atteinte, qu’il doit chercher d’autres personnes ou de leur demander de s’investir sur la technique vocale. Elle l’a dit au chef de chœur qui était déjà assez déprimé. Je pense qu’elle a raison. Il vaut mieux voir les limites et les confronter au projet initial plutôt que de s’épuiser dans un travail qui ne pourra pas grandir.
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Nous avons parlé autour de ça. Je pense qu’un groupe quel qu’il soit amateur ou professionnel qui n’évolue pas et ne grandit pas techniquement et musicalement s’étiole, et laisse place aux problèmes relationnels.
Facile à théoriser, tellement difficile à détecter ou à prendre conscience. Les premiers émois d’un groupe qui se constitue ressemblent beaucoup aux transports amoureux, avec toute l’illusion et la projection qui les accompagnent. Très vite, les limites de chacun apparaissent et les préjugés arrivent. Ensuite, désillusion, c’est là que le travail de base est important parce qu’il ne demande aucune pensée, juste d’être accompli. Mais il n’y a pas de recette ou de méthode.



Ce dont je suis de plus en plus convaincue, c’est que le travail personnel est l’unique éventuelle solution. La capacité d’un artiste à se remettre en question et remettre en permanence le doute au centre du travail est l’unique gage d’un possible développement. Comprendre que la nécessité intérieure ne sera pas donnée par l’extérieur, ni par le public. Demander et chercher la reconnaissance parce qu’elle est essentielle mais ne pas en faire le centre du travail . Et quand elle arrive, s’en méfier comme la peste, même si c’est tellement bon de croire 2 mn qu’on pourrait être ce que l’autre renvoie d’admiration et d’amour.

C’est curieux, je me demande si cette tristesse qui m’habite toujours les 12 ou 24 h après un spectacle ne me protègent pas finalement un peu. Le dernier jour, nous avons reçu tellement de témoignages admiratifs que j’étais un peu mal à l’aise. Je n’arrive pas à y croire et ça me fait un peu peur.
Bien sûr ça vient toujours de jeunes artistes : « je veux être comme vous » !! Mama mia, s’ils savaient ce que c’est que d’être moi ! Même moi par moments j’aimerais souffler et être quelqu’un d’autre.
Je me pose la question de la transmission. Est –ce que l’admiration est réellement un bon vecteur pour la transmission ???
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Brasilia a été complètement inventée il y a 50 ans. Cette ville ne ressemble à aucune autre. Deux lacs ont été complètement inventés au nord et au sud de la ville. Nous y allons pour manger à midi. J’y retrouverai Ana, et Lucia (une universitaire de Brasília tellement intelligente que je passe mon temps à lui poser des questions pour l’entendre réfléchir à voix haute.)
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